Famille(s) de voyageurs
En partant au bout du Monde, on espérait bien faire quelques belles rencontres. Rencontrer d’autres cultures, d’autres visions du monde. Il y a bien ces rencontres marquantes, mais celles que je n’avais pas imaginées, pas anticipées, ce sont celles avec les autres voyageurs. Parce qu’on est loin du pays, loin de notre langue, il est plus facile de rentrer en contact avec nos compatriotes au bout du monde. Et comme on partage la même façon de voyager on a vite des points communs. Ainsi, depuis 9 mois, on s’est fait quand même pas mal de copains de voyage…
Les familles sont particulièrement marquantes. Je citerai juste Inès et Benoît, avec qui nous avons partagé le réveillon de Noël alors que nous nous sommes rencontrés le matin même, Niko Joana et leur petit Mani que nous allons retrouver avec qui nous avons partagé les plages du Costa Rica, du Mexique et bientôt de Crête, Les 8 Pieds sur Terre, nos compagnons de volcans que nous n’aurons malheureusement pas réussi à recroiser dans nos boucles (parfois à quelques jours près), les Tandems, les plus balèzes des voyageurs, à cheval sur leurs 2 vélos qui descendent l’Amérique envers et contre tout, les 5 couleurs primaires qui ont bravé 3 fois de suite le confinement colombien pour profiter des soirées ensemble et qu’on aura aperçu, le temps d’un selfie, derrière la vitre d’aéroport des Galapagos, et les Gnocs around the Word, avec qui on aura passé une semaine de vacances au Paradis, à partager une maison comme de vieux potes…
Il y en a 3 autres qui font aussi partie de la tribu. Kamel et Justine qu’on a croisés plusieurs fois du Guatemala au Mexique, et l’ami Seb rencontré en même temps, croisé plusieurs fois aussi, et qu’on a retrouvé par « hasard » à Merida.
Tous ceux là ce sont rencontrés ailleurs, sans nous, avant ou après notre rencontre, dans la grande trame du voyage. Nous avons vu des photos des uns avec les autres et on s’échange régulièrement des nouvelles.
Je m’étonne de ce lien fort qui nous a unis. Est-ce juste notre goût du voyage, ou les conditions particulières de cette année, qui font de nous une grande tribu ? Mais on a croisé d’autres personnes et d’autres familles dont nous n’avons pas gardé de contact ou avec qui nous nous sommes juste croisés.
Nous avons partagé des moments forts avec eux, de grandes discussions, de longs jeux pour les enfants et toute la banalité des temps creux de voyage dont nous ne parlons jamais. Nous avons partagé les interrogations de la suite du programme, les bons et les mauvais plans, sur la route de chacun.
Les enfants ont l’impression d’avoir gagné de nouveaux cousins et moi des personnes qui me sont chères. Je me demande si nous n’avons pas juste rencontré des humains débarrassés de leur manteau social alors que nous avions posé le nôtre aussi. Un rapport d’âme à âme un peu plus direct que d’habitude.
Rentrés à Madrid, colonisée par les Français en ce weekend de l’Ascension, comment expliquer à Faustine qu’on ne parle pas aussi facilement aux autres francophones que ce que nous faisions jusqu’à maintenant ? Le regard interrogateur des gens qui nous suivent dans la file d’entrée du Prado en dit long… Nous ne sommes pas sur la même longueur d’onde, celle qu’on partageait avec nos voyageurs du bout du Monde… Retrouverons-nous de tels contacts dans les quelques mois de voyage qui nous restent ? Est-ce possible ici aussi ?
Si l’un d’entre vous, mes voyageurs, lit ce bout de texte, je vous remercie du fond du cœur de nos échanges, de notre rencontre, de ce petit bout de toi que tu m’as échangé contre un petit bout de moi… Ce petit bout de toi, j’en prendrai soin, promis !