Rencontres

Anthony

Imaginez une nuit de pleine lune, un village en bord de mer, des cocotiers, ambiance Caraïbes... Un homme noir, marche sur le sable. Il est torse nu, La lumière de la lune souligne ses muscles dessinés. Il pause sa main au sol. « Non, elles ne sont pas prêtes »... Ce soir, Anthony cherche les bébés tortues qui vont peut être sortir. Mais il a plu aujourd’hui, le sable est trop dense pour des petites nageoires toutes neuves...

Soudain il s’arrête. Là, des traces fraîches dans le sable lisse ! Elles sont nettes, reconnaissables entre mille.... « Jaguar » ! Nous voyons Anthony se rapprocher du sol, observer les bosquets, suivre les traces... Il est excité, une femelle et son petit... les traces sont fraiches. Ils ne doivent pas être loin ! Il les traque !

« Si le jaguar sort, surtout ne courrez pas ! Je lui parlerai »... rassurant, un homme qui parle jaguar...
le voilà maintenant qui grogne, qui feule... il marche presque à quatre pattes, semblant danser sur la plage baignée de lumière lunaire... cette lumière qui se reflète soudain dans des yeux. Une ombre dans le noir. Juste deux yeux qui brillent. « The baby! » nous chuchote t’il.... « ouhhh. It’s dangerous »... nous marchons à reculons, nous éloignant de la lisière de la jungle pour longer la mer, la femelle doit être proche en train de veiller...

un peu plus loin, une autre ombre, tapie au sol. 2 autres points de lumière, 2 yeux qui regardent ces étrangers sur son territoire... « the mom »... qui observe qui ? Légère tension. Nous rentrons  vers le village. Troisième paire d’yeux qui nous surveillent... la famille est au complet... Anthony est surexcité. « You are so lucky! You met 3 jaguars tonight ! »

Revenus  sous les lumières électriques, Anthony boite alors qu’il dansait presque, d’un pas si léger sur le sable... Il nous montre ses pieds abîmés, nous raconte sa vie difficile...Anthony est plus a l’aise dans la nature qu’avec les humains... Nous lui donnons quelques colons pour qu’il puisse étancher la faim qui le tenaille depuis trois jours.
Anthony vit a l’écart, reste dans l’ombre, comme un personnage presque irréel. Il m’appelle « hermanito », peut-être parce que je lui ai fait confiance ce soir, peut-être parce que je l’ai juste considéré comme un être humain, peut-être parce que je l’ai rêvé... 

portraits
21 décembre 2020